DES ÉDIFICES EN BOIS VISENT LE CIEL
VAXJO, Suède – Stockholm et ses banlieues sont remplies de grues de construction qui reflètent la population grandissante et la pénurie de logements.
On a l’impression qu’une ville entière est en construction.
Le développement de 96 hectares comprend une collection de maisons, bureaux, institutions et d’espaces publics conçus comme un modèle durable, bien vivre et suit la vision du plan Stockholm 2030.
Un quartier est particulièrement notable : deux carrés où sous une fondation de ciment se trouve un amalgame de tunnels pour le rail et les autos. C’est un immense défi d’ingénierie mais le plus impressionnant est le complexe d’appartements qui y sera érigé. Ce sera un des plus gros bâtis au monde en bois.
Une image du complexe Cederhausen lorsque complété – photo general Architecture
Le béton est nécessaire pour la fondation. mais la suite est entièrement en bois jusqu’à 13 étages. Le premier bloc est presque terminé et le second débutera sous peu.
Les tunnels sous la structure ont une limite de poids qu’ils peuvent supporter, mais compte tenu que le bois pèse le cinquième du béton, la structure peut contenir plus d’étages.
L’utilisation du bois comporte également des avantages environnementaux.
« Le bois est un excellent matériel pour construire dans les villes plus denses car on peut préfabriquer les différents éléments en usine au lieu de sur le site » selon Mathias Fridholm, directeur de Svenskt Tra (Bois suédois). Il ajoute que la préfabrication accélère la construction et diminue la congestion du trafic autour du site et minimise la fermeture de routes. De plus, le bois est plus léger que le béton ce qui permet d’ajouter des étages aux édifices existants nécessitant un agrandissement.
Un espace extérieur d’un Cederhusen en construction– photo general Architecture
Le bois compte pour 20% des édifices à plusieurs étages en Suède, mais cette proportion est en hausse. Cette tendance est due, entre autres, aux compagnies tel Folkhem (développeur du complexe Cederhusen) qui en 2012 a décidé que de construire qu’en bois. Elle a également une douzaine d’autres projets présentement en développement.
« Ce projet, situé au cœur de Stockholm, où il sera possible d’y acheter un appartement fait en bois,» selon Anna Ervast Oberg, chargée de projet à Folkholm, «ce sera un symbole des possibilités, des techniques et des capacités industrielles que nous avons» elle ajoute que de changer la structure d’un édifice du béton au bois résulte dans une diminution de 50% des émissions de GES. Si on regarde sur la durée de vie d’un édifice typique en béton, approximativement 70% des émissions proviennent des deux années qu’elle est en construction.
« Ensuite on peut optimiser d’avantage car nous avons moins de transport et une période de construction plus courte. Ce qui rend les réductions encore meilleures. Ce que nous devons accomplir immédiatement est d’arrêter très rapidement les émissions. Ceci nous donne une idée où nous devons nous orienter pour avoir le plus d’impact », selon Ms Oberg.
Les bénéfices du bois C.L.T. (bois lamellé-croisé) sont nombreuses. Il est exceptionnellement fort et léger. Il est ‘respirable’, car il ne nécessite pas des couches de plastique pour gérer l’humidité comme le béton. Le béton requiert du sable, une ressource limitée, qui nécessite des procédures dommageables tel le dragage de fonds marin tandis que la forêt aménagée peut être reboisée. De plus une ville en bois devient un lieu urbain de stockage de carbone.
Un projet phare à Vaxio, la gare principale, l’hôtel de ville et un centre d’achats intérieur recouvert de vitres et avec une structure en bois – photo Gabriel Leigh
Avant 1995, ces constructions n’étaient pas permises, même en Suède, et résultait de règles adoptées en Europe où il y a longtemps dus aux feus qui avaient détruits des villes construites en bois. La limite de deux étages a été abandonné avec l’adoption des nouvelles règles.
La technologie s’est depuis développée au point où le risque par le feu s’apparente aux autres matériaux. Les nouveaux règlements sont maintenant basés sur les résultats et non sur le type de matériel. Ce qui veut dire que si le développeur peut prouver que le matériel choisi peut résister aux feux, le type de matériel n’importe pas.
Quant à la hauteur, il a peu de limites. Sauf qu’à partir d’une quinzaine d’étages, vu que le bois est plus léger, elle nécessite de la stabilisation au fur qu’elle prend de la hauteur souvent sous la forme de planchers en béton. Au fur que la technologie évolue, ceci pourra changer. Actuellement le record de hauteur appartient à un édifice de 18 étages à Brumunddal, Norvège.
Vaxio Suède, utilisation de panneaux préfabriqués en C.L.T. – photo Gabriel Leigh
La Suède a des forêts bien aménagées qui couvrent 70% de son territoire, soit le double d’il y a 50 ans. Un des plus gros complexes d’appartements a utilisé 5,975 m3 de bois pour sa construction. Cette quantité de bois a pris approximativement 20 minutes à pousser dans les forêts suédoises.
Thomas Lord de l’Université de Linkoping en Suède a étudié pendant des années l’industrie du bois. « Il devrait être évident que le bois est supérieur au béton. Il est efficient et rapide. On peut préparer exactement ce que le consommateur désire en usine. C’est un matériel renouvelable, fort, durable et léger. »
Il ajoute « Le défi est dans la structure de l’industrie, la chaîne de valeurs que nous avons développé pendant des années. Dans n’importe quelle industrie mature, le chemin de la profitabilité est connu et si on doit changer, il aura de la résistance »
Une armature en bois au-dessus de rails de train – photo, Gabriel Leigh
Les acteurs dans l’industrie du bois sont confiants. « Nous sommes passés de 0 à 20% depuis 1994 et nous passerons à 30% en peu de temps » selon M. Frdholm de Bois de Suède.
« L’industrie de la construction est moyenâgeuse » ricane Ms Oberg « par contre depuis quelques années on approche du point de bascule. On voit de plus en plus de projets en bois. D’autres pays emboitent le pas. L’évidence des changements climatiques, les années de lobbying, les discussions avec les politiciens, travailler avec les règles existantes, augmenter les compétences en ingénierie. Nous avons des projets de référence pour démontrer que c’est possible. »
Ces projets phares vont d’un immeuble à appartements de 7 étages à une tour de contrôle d’aéroport à Skelletea construit en 2004. Une compagnie expérimente avec des tours d’éoliennes de 500 pieds en bois dont un modèle test de 100 pieds a été érigé en 2020.
Vaxio Suède, le bois est central à leur stratégie de développement depuis les années ’90 – photo Gabriel Leigh
Ce changement est présent dans d’autres pays. La compagnie Veidekle, basée à Oslo, a construit deux structures identiques à Trondheim Norvège, l’une en bois et l’autre en béton. « La résultante est que nous avons pu rajouter 3 étages à l’édifice en bois et sauver 2 million de kroners (370,000$) sur la fondation car plus facile à construire » selon Ms Oberg. « Ils ont étudié la santé de leurs ouvriers et ont remarqué moins d’absentéisme dû à la maladie sur le projet en bois. Les accidents de travail étaient également moindres tout comme le temps global de construction »
La petite ville de Vaxio, population de 94,000, est un pionnier au niveau de la construction en bois car elle est au cœur de sa stratégie de développement depuis les années ’90. Ces constructions représentent 50% des nouveaux édifices. La ville a désigné d’immenses terrains en marge de la ville réservés pour la construction uniquement en bois.
« Nous croyons au bois en tant que matériel – c’est renouvelable et c’est santé » selon Ms Winberg, politicienne locale, « Nous avons les ressources à proximité, aussi bien les utiliser. Je pense que les gens tiennent aux vraies valeurs. Ces constructions le sont et en plus elles proviennent des forêts qui nous entourent »
Une nouvelle loi en Suède va imposer une déclaration compréhensive de changement climatique pour chaque nouvel édifice en 2022. Le calcul comprend l’impact total, de GES, du début jusqu’à la fin de la construction, incluant les matériaux et le transport. L’idée est que lorsque tous les éléments seront pris en compte selon une approche systématique, les avantages du bois seront plus apparents.
« Aujourd’hui les moulins à scie exportent 70% de leur production à d’autres pays. » selon M. Fridholm du groupe forestier, « Dans un futur rapproché nous allons analyser quelles ressources nous avons en Suède que nous pouvons mieux utiliser et les yeux se tourneront vers la forêt. Quelle est la meilleure façon de l’utiliser ? Nous pouvons construire en bois et y stocker du carbone. Nous pourrons y devenir auto-suffisants. »
Traduit du New York Times, du 30 juillet 2021, écrit par Gabriel Leigh
Affiche produite par Forêt-Estrie